Ce poème écrit le 19 mai 1836 figure dans le recueil de Victor Hugo "Les voix intérieures" publié en 1837.
Gabriel Fauré, sans doute sensible à sa composition musicale a composé sur ses vers une mélodie , un duo pour Soprano et ténor ou deux soprani.
Puisqu'ici bas toute âme
Puisqu'ici bas toute âme
Donne à quelqu'un
Sa musique, sa flamme,
Ou son parfum;
Puisqu'ici toute chose
Donne toujours
Son épine ou sa rose
A ses amours;
Puisqu'avril donne aux chênes
Un bruit charmant;
Que la nuit donne aux peines
L'oubli dormant;
Puisque l'air à la branche
Donne l'oiseau;
Que l'aube à la pervenche
Donne un peu d' eau;
Puisque, lorsqu'elle arrive
S'y reposer,
L'onde amère à la rive
Donne un baiser;
Je te donne, à cette heure,
Penché sur toi,
La chose la meilleure
Que j'aie en moi !
Reçois donc ma pensée,
Triste d'ailleurs,
Qui comme une rosée,
T'arrive en pleurs!
Reçois mes voeux sans nombre,
Ô mes amours!
Reçois la flamme ou l'ombre
De tous mes jours!
Mes transports pleins d'ivresses,
Purs de soupçons,
Et toutes les caresses
De mes chansons!
Mon esprit qui sans voile
Vogue au hasard,
Et qui n'a pour étoile
Que ton regard!
Ma Muse, que les heures
Bercent en rêvant,
Qui pleurant quand tu pleures,
Pleurent souvent!
Reçois , mon bien céleste,
Ô ma beauté,
Mon coeur , dont rien ne reste,
L'amour ôté!
Victor Hugo (1802-1885)