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  • : Plaisirs de la vie, de l'esprit, moments forts ou joies simples qui donnent du prix à l'instant ou qui se gravent dans le temps.
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1 juin 2010 2 01 /06 /juin /2010 17:21

 Cette fois je n'ai pas vu venir le danger: je me promenais nonchalamment, jetant un coup d'oeil intéressé vers des arbustes où j'entendais des bruissements prometteurs de festins à plumes lorsque je vis se poser à quelques mètres à peine, un oiseau à l'espèce non identifiée, un peu gros pour moi peut-être mais tellement insouciant que c'en était comique... Il cherchait sans doute des vers dans la terre humide de la pluie récente et tout à sa besogne fructueuse, il ne m'entendit pas arriver. Je crois que j'étais  aussi vent de face et il ne pouvait pas me sentir: je connais les règles de l'approche du gibier......
 Donc, j'avançais à ras du sol pour mieux bondir le moment venu, à peu près sûr de mon fait, lorsque je perçus un froissement bizarre au dessus de ma tête comme une grande voile qui se déploie. J'ai pensé: un ptérodactyle!!!... car j'avais entendu parler mes maîtres des aventures d'une certaine Adèle Blanc-Sec et de l'éclosion mystérieuse d'un oeuf préhistorique qui avait semé la terreur et...J'arrête, je m'égare... Bref, c'était insolite mais il n'y avait aucune raison de s'alarmer...Je me moquai intérieurement de mon imagination par trop débordante et de l'embrouillamini de mes références et puis je n'avais pas vu le film , moi, alors...  comment reconnaître un ptérodactyle?
 J'en étais là de mes cogitations quand l'oiseau picoreur s'avisa de me regarder d'un oeil torve, plein de menaces et d'insolence. Mon sang ne fit qu'un tour et je fonçai tête baissée dans le piège qui m'était tendu...
 A peine avais-je atteint le volatile que je fus attaqué en piqué par le  "ptérodactyle" : j'eus beau lancer mes griffes, rugir, je dus lâcher prise et m'avouer vaincu.
                           reconstition-pterosaure.jpg
 Une fois de plus le sang a coulé:le mien!... J'ai reçu un coup de bec acéré comme une dague, à la naissance du cou.
 Il a fallu qu'Elle désinfecte ma plaie et nettoie mes poils tout collés...
 Je ne suis pas fier: mon préhistorique est vraisemblablement une pie.
  Mais pas n'importe quelle pie!... C'est la pie vengeresse, l'envoyée de la famille de ma dernière proie, petite bestiole innocente!
 C'est la vendetta déclarée!!!!! Pauvre de moi....
 Je délire, je vais dormir pour oublier....

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31 mai 2010 1 31 /05 /mai /2010 15:14

 9782352941507.jpgVoici un recueil de nouvelles fantastiques qui ont valu à son auteure des éloges enthousiastes . Mélanie Fazi, née en 1976, est "la princesse du fantastique français". Le journal  Le Monde parle d'une "réussite majeure".
 Il est vrai que les dix nouvelles scotchent le lecteur par leur originalité et leur ton. La langue est toujours bien maîtrisée et Mélanie Fazi sait jouer des différents registres sans lasser. Les personnages, bien que brièvement rencontrés comme l'exige le genre de la nouvelle, ont suffisamment de relief pour que l'on s'y intéresse.
Les histoires s'enracinent dans le quotidien, la banalité. Les lieux sont facilement identifiables: une maison de campagne, l'autoroute et l'aire d'autoroute, la boutique d'un tatoueur, un restaurant grec, une ligne de métro, une scène de concert, une chambre de lycéenne, l'atelier d'un artiste peintre....Et pourtant, l'étrangeté s'insinue peu à peu, on dérape vers l'incroyable en y croyant, on accepte la rencontre improbable de la magicienne Circé devenue gargotière et spécialiste es- herbes aromatiques, tendance bio et Odysseus-Ulysse, client lamda qui débarque un certain soir à La taverne de Colchide dans  Mémoires des herbes aromatiques. On suit  fascinée, dans Serpentine, les travaux mystérieux du tatoueur chargé d'inscrire Mnémosyne avec l'encre de l'oubli sur le corps de l'assassin ou bien la lycéenne poursuivie par l'obsession du Phénix et qui se mutile, fume pour le sentir proche, se consumer en lui, brûler( au sens propre) la Bérénice qu'elle était pour  qu'il la change" en un autre corps, plus beau, plus fragile.(...) Un corps qui me ressemblera enfin, que je pourrai reconnaître comme le mien.
 Je me ferai phénix, esprit du feu, je me fondrai dans la fumée, je me disperserai aux quatre vents. Puisqu'il me le permettra.
 L'heure de la libération, enfin. La première bougie m'appelle."
 Dans cette nouvelle-ci, Rêves de cendre, Mélanie Fazi donne à saisir, sans aucun dogmatisme, avec le seul pouvoir de l'imaginaire et la voix de la jeune fille, les conflits secrets de l'adolescente mal dans sa peau. En partant du sens littéral de cette dernière expression, on peut imaginer le processus de création de la nouvelle et sa pertinence.
 Je ne vais pas dévoiler ici la teneur des autres histoires, ce serait gâcher le plaisir  du fantastique...
  Avec des référents culturels mythologiques connus de tous ou des scènes du quotidien sans relief à première vue, Mélanie Fazi nous embarque à notre corps défendant dans les arcanes de l'âme, de l'humain ou de l'inhumain. On en sort un peu secoué mais plus riche de découvertes sur l'envers du décor.

 Ce livre de 315 pages regroupe des nouvelles publiées antérieurement et des inédites.
 Il a été publié  aux éditionsL'ombre de Bragelonne en 2008.
 ISBN:978-2-35294-150-7

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30 mai 2010 7 30 /05 /mai /2010 21:21

 Voici un bijou d'artiste- créateur qui rend hommage à la beauté de l'arbre et qui pourrait bien représenter l'arbre de vie.
 Il m'a été offert comme cadeau de fête des mères, à moi qui chéris les arbres et les oiseaux qui les peuplent. J'en suis touchée et fière!
 Je vous le montre, à vous membres de la communauté "de l'arbre à l'art", à vous qui saurez l'apprécier...
                                  mai 2010 136

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28 mai 2010 5 28 /05 /mai /2010 18:36

Un grand coup de coeur pour le roman Sous la tonnelle écrit en français par l'auteure libanaise Hyam Yared et publié en octobre 2009 chez Sabine Weispieser,éditeur.

 C'est la rencontre avec Hyam Yared lors des journées de Littératures Métisses à Angoulême qui a déterminé mon choix de lecture. J'ai découvert une jeune femme à la sensibilité forte qui dans une belle langue, a évoqué son livre et son pays natal, le Liban.
Elle a su émouvoir et persuader les lecteurs de partir avec elle découvrir cet étrange et tout petit  territoire coincé entre de grandes puissances du Proche Orient qui menacent son autonomie. Pour y pénétrer, il suffit de suivre l'histoire de la narratrice confrontée à la mort soudaine de sa grand-mère: Je suis restée sans voix.J'avais quitté ce monde en même temps que toi. Pourtant je suis restée.
 Elle reste, oui, pour retrouver dans l'intimité du boudoir de sa grand-mère les échos de l'enfance et de son adolescence heureuse auprès d'elle, les conseils avisés d'une femme qui entendait mener sa vie  en toute liberté au mépris du danger, les choix extrêmes qu'elle avait faits. Peu à peu cette vieille femme morte reprend la parole à travers les épisodes retranscrits, comme son incroyable détermination à ne pas abandonner sa maison (car l'abandonner,  c'est mourir deux fois) lors de la guerre civile. Beyrouth coupée en deux, séparée par une ligne de démarcation.(..) Même un chat ne pouvait s'y hasarder sans risquer d'être tué. Beyrouth Est. Beyrouth ouest. Ta maison, juste au milieu. Dans une zone fantôme désertée par ses habitants. Investie par des combattants oublieux de leur cause à force de tuer ou de crainte d'être tués. La narratrice évoque, dans une invocation à la morte, la vie de la jeune femme veuve à trente et un ans, sa fidélité inébranlable à son amour défunt et sa dévotion à contribuer au bonheur d'autrui, son combat pacifiste pendant la guerre civile, son intelligente diplomatie et sa force de résistance...Elle remonte le cours de l'histoire de sa famille arménienne. A cette femme idéalisée et accomplie, elle oppose sa propre vie de femme ligotée longtemps par l'autorité paternelle et la tradition qui ose enfin secouer le joug en divorçant de Fayçal épousé sans amour.
 Alors qu'éclatent les premiers obus de l'offensive israëlienne, que les" corbeaux"ont quitté précipitamment la place, survient un inconnu très digne, venu apporter un gros dossier à la grand-mère. Ironie tragique, trop tard...
 Sous la tonnelle, dans le jardin adoré, commence alors une longue histoire , à la troisième personne cette fois, celle de l'amitié amoureuse et  terrible d'exigeance et de respect entretenue des années par lettres, littérature interposées entre la grand-mère et Youssef, hommeépris d'absolu et d'archéologie, rencontré au hasard d'une traversée vers l'Europe en 1947,  peu après la mort de l'époux  auquel elle avait juré une fidélité éternelle. C'est l'histoire de ce Youssef, de ses parents, de son fils Eugène qu'il n'a jamais connu, ici présent  que le lecteur découvre en même temps que la petite fille médusée devant ces révélations. Seul fil à la recherche patiente qu'il a menée, un prisme offert en cadeau symbolique.
  On voit s'élaborer un double et magnifique portrait de femme, complexe et attachant, émouvant.
              
                     Hyam Yared
 
  Roman de Femmes, ce roman est aussi une fresque représentative de ce que fut la région des années trente jusqu'à nos jours (le roman va jusqu'en 2006). Un pays composé de dix huit communautés religieuses autonomes dotées d'un grand pouvoir reposant sur la tradition et le dogme, un pays de contradictions et de contrastes qui garde avec la France un contact très vivant, ne serait-ce que par la langue qui reste celle de la culture. C'est un roman historique dont l'essentiel se passe à Beyrouth et on suit l'intrigue avec d'autant plus de plaisir qu'elle est très bien menée et que les personnages deviennent très vite familiers. En effet, ils sont criants de vérité et l'auteur a de la tendresse pour eux et une intime connaissance puisque le roman met en scène la grand-mère de Hyam, des proches, des familiers et nous fait entrer dans leurs maisons et  partager leur quotidien. Même ceux nés de l'imagination comme le personnage de Youssef ont une présence très forte.
  L'histoire montre l'Histoire à travers les destinées individuelles,dernier maillon des conflits à l'échelle mondiale, comme par exemple, les répercussions de mai 68 en France  sur la vie sentimentale de deux libanais.
  Celle qui reste en mémoire quand le livre se referme, c'est la grand-mère disparue, sa liberté  affirmée, sa générosité et aussi sa fantaisie, son humour, la fermeté de ses engagements. Point d'ancrage et guide pour la narratrice, la petite fille de trente ans, elle est un idéal de femme amoureuse, complexe et énigmatique dont les cahiers ne délivreront qu'une part du mystère. Hyam Yared reinvente les secrets de cette grand-mère chérie sans jamais la trahir.
  Surtout, l'écriture de Hyam Yared est tellement efficace à suggérer l'émotion ou croquer des instantanés, qu'il faut résister à l'envie de la citer en entier. Donc, simplement quelques lignes :
 Il a fallu ta mort pour que l'enfance me revienne en mémoire. cette manière de ne pas détacher  tes yeux de ton laurier en émettant un soupir qui ressemblait à un soulagement. "Quelle petite grande chose que la vie!". Tu faisais une pause avant d'ajouter:"Détourne tes yeux de ce qu'il y a de laid. La beauté nous regarde en face". J'aurais bien aimé. Ma déception était hideuse et tes théories utopiques. J'ai longtemps cru que tu vivais dans le conformisme avant de réaliser que tu vivais pour elle. La beauté. Moi je voulais l'urgence. (...) Si j'avais eu à renaître, j'aurais tout changé, sauf  toi. Je n'avais pas eu à te chercher pour te trouver. Tu étais là, tout simplement.
  Voici pour la tendresse tout en retenue et pudeur...et voici pour l'humour au premier jour des condoléances, évoquant une dame arborant un manteau de vison en juillet:
   Je l'ai revue plus tard, à l'heure du repas, qui se délectait des victuailles servies par la famille, tradition oblige. Célébration de la morte sur plusieurs jours. Trois. Trois jours au cours desquels toutes les délégations de corbeaux défilent. Des courts, des gros. Des sans pattes. Des sans ailes.(...) Ca creuse d'être corbeau. Ca donne faim. C'est là que je l'ai revue, enfournant une crevette de ses doigts boudinés. Lorsqu'elle s'est aperçue de ma présence, elle a pris un air  triste et, la bouche pleine de crevette, ou d'ennui, m'a dit: "Il fait beau aujourd'hui."

 Roman publié en 2009 aux éditions Sabine. Wespieser  (environ 300 pages)

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28 mai 2010 5 28 /05 /mai /2010 15:06

         Je suis déçu, très déçu...
  Les humains sont incompréhensibles: je leur fais un cadeau de choix, une offrande toute chaude et palpitante et Ils sont mécontents!... Mortifié, je suis resssorti en emportant ma prise et j'ai passé ma mauvaise humeur sur la bestiole.
  C'était très amusant de la faire sauter en l'air et de la rattraper au vol. J'ai avalé quelques plumes au passage que j'ai recrachées immédiatement, mais c'est léger comme une baudruche, tiède et soyeux. Un cadeau de choix, je le redis!...un présent qu'ils ont dédaigné!...
   A la réflexion, je crois que je m'y suis mal pris...
  Je savais qu'Elle était dans le bureau, devant sa machine à cliquetis et je suis rentré à pas de loup, ou plus exactement à pas de chat, tenant l'oiseau avec soin dans ma gueule. J'ai frotté mes reins contre sa jambe pour l'avertir de ma présence, elle a tendu la main vers moi pour me caresser, et doucement j'ai déposé sur ses pieds nus la petite boule  de duvet chaude. Elle a sursauté, a poussé un petit cri effaré et m'a grondé: "qu'as-tu fait Fil de soie? c'est un petit oiseau juste sorti du nid! Il ne faut pas chasser les oisillons! laisse-leur le temps d'apprendre à chanter, de voler haut dans le ciel...Tu n'as même pas l'excuse d'avoir faim. Vilain chat, va-t'en!".
  Je n'ai pas compris et je suis revenu, trois secondes plus tard et j'ai posé l'oiseau de nouveau à côté d'Elle en accompagnant mon don d'un Miaou tendre. Je voulais lui dire combien je l'aimais, à ma manière, celle d'un félin, d'un redoutable chasseur. Offrir la nourriture durement gagnée est la marque de l'attachement que l'animal a pour un autre être vivant. Elle devrait le savoir!!!!!!
Au lieu de ça, elle a poussé un ridicule cri de souris à la vue de la bestiole toute molle et inoffensive, a appelé Lui à la rescousse.
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                             Il a pris l'oiseau dans ses mains, l'a caressé...
et j'ai cru que Lui au moins allait apprécier. Je l'ai regardé avec fierté et       confiance et alors...lui aussi m'a fait des reproches avec de la tristesse dans les yeux.
  Cette fois, j'étais fixé: sur ce point, nous ne pourrons jamais nous entendre...
  Désormais, je ne montrerai plus mes prises de chasse. Ils ne sont pas capables d'apprécier. Je n'en parlerai qu'à mes amis-chats!!!!!!

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27 mai 2010 4 27 /05 /mai /2010 15:32

MaraisSansPersonne.jpg      

            Tout a commencé par l'envie de découvrir cette romancière et essayiste dont on parle beaucoup dans la presse et qui enchante certaines de mes amies. J'avais acheté "Magnus", me disposais à le lire, lorsque parlant avec elle de Sylvie Germain, S. la bibliothécaire de la médiathèque m'a proposé "Tobie des Marais", un de ses premiers romans, se déroulant dans les paysages étranges et fantastiques du Marais Poitevin que j'aime parcourir depuis toujours, happée par leur silence et l'omniprésence de l'eau et de la végétation, "...une terre tout à fait inconnue, irréelle presque, où les éléments conflu(ai)ent sous l'effet d'une mystérieuse alchimie".
      
       J'ai retrouvé ce que j'espérais mais ce n'est pas l'essentiel. J'ai été plongée dans un univers où l'horreur surgit dès les premières pages: sous un ciel d'apocalypse,minéral, un enfant blond pédale follement sur son tricycle à la recherche de sa mère. Il va "au diable", chassé par le doigt terrible de son père transfiguré en un visage grimaçant de douleur et d'incompréhension. On découvre ensuite que l'impensable s'est produit: la mère de Tobie, Anna, a été décapitée alors qu'elle chevauchait dans la splendeur de l'été dans une allée couverte de glycines par un fil de lampions distendu, reste fatal d'une fête d'autrefois. Le corps magnifique de la jeune femme revient sur le dos de la jument. Personne ne retrouvera jamais sa tête. Disparue, volatilisée, volée? Elle n'aura pas de véritable sépulture tant qu'elle ne sera pas retrouvée. Le merveilleux s'imbrique étroitement au réel atroce, les sortilèges du marais s'exerceraient-ils?
  Le deuil ne peut se faire: Théodore, son époux, fou de douleur et de révolte, devient paralysé, aveugle aux autres, muré dans ses visions, muet, hormis des éclats de fureur qui l'anéantissent, lui et son fils. La famille semble la victime de malédictions en chaîne: la vieille Déborah, arrière grand-mère de Tobie, presque centenaire, exilée de Pologne, a traversé le siècle et reste la gardienne de mémoire auprès de l'enfant qu'elle élève désormais. La mort lui a ravi tous les siens sans qu'elle sache où ils reposent ni même comment ils ont disparu. L'oncle Arthur et la tante Valentine sont frappés eux aussi  de folie destructrice et deviennent étrangers à eux-mêmes. Quelle enfance pour Tobie! Le lecteur souffre de cotoyer une telle détresse.
  Ellipse temporelle: Tobie jeune homme part sur les routes en compagnie d'un étranger énigmatique à l'aura exceptionnelle, Raphaël, croisé à plusieurs reprises dans le roman et qui devient son guide au sens propre et au figuré. Tobie rencontre la mer, l'estuaire, son destin et Sarra. C'est là que le roman côtoie de très près le récit biblique et les prodiges du Livre de Tobie. Les chapitres portent d'ailleurs en exergue des citations de psaumes et du Livre qui éclairent le contenu du récit et lui donnent une dimension mystique, celle de la quête et  des épreuves. Pour qui connait le texte saint, la deuxième partie du livre est prévisible mais qui le connait intimement? Je dois avouer que j'en ignorais tout et que le roman fonctionne bien sans la référence explicite.
 
        Fascinée cependant par la force de cette histoire et sa poésie, j'ai voulu en savoir plus et je me suis aventurée dans la lecture du Livre de Tobie. J'y ai retrouvé la trame du récit, les épisodes miraculeux et les noms des personnages: Deborra; Tobie, fils de Tobit (devenu Théodore dans le roman); Anna; Sarra,fille de Ragouël, et Raphaël l'archange.

        J'ai mesuré alors la force de la littérature dans son processus d'appropriation et de détournement du texte initial. Le roman restitue la chair, la rumeur, le bruit, la folie de la lutte contre le mal et le malheur, le sang, l'embrasement des émotions, le silence entre les mots, les regards. Il sait dire aussi la pureté et la sérénité dans l'amour retrouvé. Il désacralise mais rend vraiment proche de l'humain le récit biblique. Pour preuve, l'ultime paragraphe du roman:
  "Et son rire s'envole dans la nuit sur un air de valse étincelante, il tourne au ras du ciel pour demander à Dieu si les choses, vraiment, ont le droit d'être comme ça. Et les hélianthes plantés sur la tombe de Déborah dispersent leurs pétales comme autant de points d'interrogation dans le vent nocturne."

 Roman paru en avril 1998 chez Gallimard. 222 pages. ISBN 2-07-075228-3.
 A été publié depuis en Folio.

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27 mai 2010 4 27 /05 /mai /2010 09:35

Voici en ce jour un peu trop gris ce cadeau du jardin: une palette de couleurs et la promesse de parfums sucrés pour qui sait imaginer ce petit bonheur  des fleurs...
 C'est le devant de ma maison : de quoi faire sourire les renfrognés ou les tristounets  et enchanter les marmousets!...
      mai_2010-106.jpg

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26 mai 2010 3 26 /05 /mai /2010 20:45

     Il y a longtemps que je ne m'étais senti aussi bien...Laissez-moi vous raconter...
     C'était lors du long week-end de la Pentecôte, fleuri et parfumé en diable. L'air était serein, la brise douce et la terrasse offrait des coins d'ombre légère  en son extrémité, celle bordée par le muret de pierres dont la chaleur était tempérée par la frondaison du vieux poirier. J'y avais élu domicile et m'étirais paresseusement comme tout vrai chat qui se respecte mais je surveillais l'oeil mi-clos, le tronc de l'arbre creux où niche, je le sais, une couvée d'oisillons. J'ai eu des recommandations et on m'a ordonné de ne point y toucher mais...je guette le moment où je pourrai aller voir de près, jeter une patte négligente au fond du trou et tâter du bout de mes coussinets, la chair duveteuse et tendre... Mes moustaches se hérissent de plaisir, je rêve que je les ai sous mon nez frémissant et ...
     Ah non! je n'y crois pas!!! Voici la voiture des petits" monsters" qui s'approche! Finie la tranquillité!...J'entends le moteur diesel: à l'oreille, ils sont à moins de cinq cents mètres...Bien sûr, Elle et Lui n'ont rien entendu!!! Ils sont sourds ces humains...et pourtant dans ce désert  vert on entend le moindre vrombissement de mouche à plusieurs mètres!...
    Pas de temps à perdre. Il me faut un abri  où ils ne me trouveront pas.
    Dehors, pas possible: avec le beau temps et la chaleur, ils vont jouer jusqu'à la tombée du jour.
    M'éloigner, c'est trop dangereux, j'en ai fait la douloureuse expérience...
    Je n'ai qu'une solution: dedans et dans le dedans du dedans, au fin fond de la maison.
    J'ai trouvé mon cocon, je m'y suis lové et tant pis pour la chaleur, j'ai fait une délicieuse régression. J'ai pris ma tenue de camouflage, me suis caché parmi les fleurs et j'ai rêvé que j'étais devenu un papillon. Par 28 degrés sous-abri, personne n'a pensé à me chercher là.  Jugez plutôt: c' était une bonne planque, non?

              mai_2010-111.jpg

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26 mai 2010 3 26 /05 /mai /2010 13:27

          evt_21232.jpg
   Littératures Métisses...
C'est un appel à l'ailleurs, à la découverte de textes rares dans l'édition et  sur les rayons des super- marchés du livre. C'est l'occasion pour les vrais libraires, ceux qui aiment vraiment les livres et les lisent, de toucher un public plus large, de proposer des oeuvres et des auteurs originaux dans une ambiance festive, désinhibante et colorée. C'est l'occasion pour les écrivains de faire entendre leur voix lors d'échanges, de conférences, de faire "salon" littéraire au sens élevé du XVIIIème...
   Sous chapiteau ouvert à tous les vents, ils se sont installés sans façon dans des fauteuils design en plastique de couleurs vives, sur une estrade, avec micros et sono sur fond de musiques rythmées ou de tambours du Burundi parcourant l'esplanade de l'île de Bourgines. Ils répondent aux questions pertinentes des animateurs, Bernard Magnier et Gérard Meudal, rompus à l'exercice et parfaits connaisseurs des livres de leurs interlocuteurs, devant un public très éclectique, pas intimidé et mobile. On les sent heureux d'avoir l'occasion de parler de leurs oeuvres, souvent comme de leurs enfants dont la conception, la genèse et la naissance ont été sources de joies et de tourments. 
   C'est de l'intime souvent mis à nu avec sensibilité et pudeur, l'histoire familiale ou celle d'un peuple intimement liées, l'écriture de l'exil choisi ou non et la double étrangeté qui en découle. La voix se fait de plus en plus grave, précise, parfois exaltée quand on touche le point sensible, la blessure sans cesse ravivée, le souvenir douloureux ou l'épisode fondateur.
   Tout autour, des va-et vient de gens attentifs aux affiches des trente- cinq ans du festival de Musiques Métisses d'Angoulême, des discussions parallèles et des achats de livres " coups de coeur" des auditeurs séduits par un intervenant précédent. Devant eux, en cercle attentif, réactif, un public qui sait montrer son écoute et son plaisir par des rires, des sourires, des applaudissements spontanés. Chaque séquence, avec un , deux, trois, ou quatre écrivains s'organise autour d'un livre,d'un thème, d'un pays, d'une problématique et les minutes imparties passent trop vite tant chacun se "donne", sait écouter et répondre aux différentes interventions des uns et des autres. Echanges fructueux qui ne peuvent déboucher que sur l'envie de lire, de relire les pages lues à voix haute, et découvrir ces livres dont on a été quelques instants séduit par l'éclairage qu'en donnaient leurs auteurs.
   Au retour, chez soi, on prend ces livres chargés de vie, encore pleins de la présence et des paroles des écrivains, on les feuillette avec émotion et respect comme des témoins pérennes de ces heures uniques passées en compagnie des créateurs de rêve et des  passeurs vers d'autres mondes réels ou imaginaires.
   Cette année, sous un soleil brûlant, Littératures Métisses nous a préparé un beau voyage autour du monde.  La fête est finie, la foule est rentrée chez elle.  Nous, chanceux lecteurs initiés, il ne nous reste plus qu'à partir à Cuba avec Karla Suarez, au Liban avec Hyam Yared, en Albanie avec Bessa Myftiu, en enfance et en imaginaire avec Chantal Portillo. Il nous sera facile d' aller en Afrique Noire: avec Sunjata en Guinée, Kossi Efoui au Togo,  William Wilson au Bénin et  Sarah Frioux- Salgas, spécialiste des arts premiers au musée du quai Branly...

  Quand on s'est séparé, il me semble qu'ils nous ont souhaité "bon  voyage!".
 Les bagages ne pèsent guère mais ils sont chargés de mille découvertes et plaisirs jusqu'à l'année prochaine...

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21 mai 2010 5 21 /05 /mai /2010 14:44

 9782742780396.jpgVoici un roman chaleureux et revigorant qui narre le quotidien d'une petite fille trentenaire et journaliste, Jade, et de sa grand-mère savoyarde, Mamoune, qu'elle vient de sauver d'une fin de vie en mouroir de maison de retraite, en lui offrant de venir partager son petit appartement parisien.
 Sur un coup de tête ou plutôt un coup de coeur, Jade "enlève" sa grand-mère de quatre-vingt ans et s'engage à prendre soin d'elle. La tendresse qui les lie fait que l'adaptation de Mamoune, la montagnarde habituée aux grands espaces et à son jardin, se fera tout naturellement. Partie vieille, malade et veuve attristée, elle retrouve au contact de Jade une tonicité et une féminité qu'elle croyait à jamais enfuie. Elle réapprend à goûter les plaisirs de la vie: un repas au restaurant, des sous-vêtements coquets, un voyage pour voir la mer avec son amoureux... De son côté, Jade mûrit, apprend le partage, la douceur, le temps passé à deux, les petites attentions et le sourire, elle qui vient de rompre avec une liaison ennuyeuse de cinq ans, qui a des soucis professionnels et relationnels. Un équilibre subtil se met en place et chacune développe son autonomie.
 Le rapport initial s'inverse: peu à peu, c'est Jade qui s'appuie sur cette vieille dame fragile qui vient de lui livrer son secret et sa véritable personnalité: "Mamoune est un sacré numéro", Mamoune est une dévoreuse de livres,"elle a pris les livres pour amants", "elle a vécu mille vies"... Elle a une finesse littéraire et un esprit critique remarquables, elle fut l'amie secrète d'un intellectuel fortuné qui  a su apprécier  sa conversation lettrée, elle que chacun, à commencer par son mari et ses propres filles, croyait limitée à ses travaux de paysanne et à des pensées figées dans la tradition religieuse et populaire! Il faut dire qu'elle cachait les livres interdits dans l'épaisse reliure de sa Bible et inscrivait des centaines de citations dans le gros  registre de comptes de la maison, au milieu des colonnes de chiffres que personne n'allait jamais consulter!...
 Quel choc, quelle libération! Elle  entreprend la relecture du roman de Jade dont les manuscrits ont été refusés par les éditeurs et se met en tête de la faire publier. Sceptique d'abord, puis admirative, Jade reprend son oeuvre.Elle ne reprend pas que son oeuvre: elle change de regard sur sa vie au contact de Mamoune et va à l'essentiel, sait reconnaître en Rajiv l'amour.Je ne devoilerai pas tout, et surtout pas la fin du roman...
 Ce roman de Frédérique Deghelt, à mon avis, est un extraordinaire plaidoyer pour la lecture, pour l'enrichissement et la volupté que procurent les livres. "L'école de Jules Ferry m'avait appris à lire, celle de la lecture allait m'apprendre à vivre?" déclare  Jeanne- alias Mamoune. C'est l'enjeu de la littérature qui est mis en évidence à travers cette réflexion et dans les pages où les personnages vivent leur relation à l'écriture.
 Mais ce livre n'est pas un traité sur les bienfaits de la lecture: ce sont les personnages qui mènent le jeu et c'est dans les regards croisés des deux femmes, l'une créatrice, l'autre lectrice que l'on perçoit la délicate alchimie qui fait que l'on va vivre intensément ou non par procuration
 La structure narrative renforce ce dédoublement: les chapitres alternent la voix de Jade, toujours à la troisième personne et celle de la grand-mère, à la première personne. L'écho de leurs voix permet de cerner les idées sur l'écriture, la fascination qu'exercent les mots, la difficulté d'écrire, les émotions de la lectrice qui peut encore réciter par coeur ce qui lui a fait aspirer à l'amour charnel, cette citation de Cyrano: "Un baiser mais à tout prendre, qu'est-ce? Un serment d'un peu plus près, une promesse...C'est un secret qui prend la bouche pour oreille...Une façon d'un peu se respirer le coeur...Et d'un peu se goûter au bord des lèvres l'âme!". Voici  ce qu'elles vivront  toutes les deux.

 Un livre que j'ai goûté avec  une certaine jubilation: belle aventure humaine et intérieure...

 Roman de 400pages environ, publié en 2009 auxéditions Actes Sud.
 Frédérique Deghelt est journaliste et réalisatrice de télévision mais elle considère le livre comme une source primordiale. Son livre n'est pas autobiographique, même si Jade est comme elle journaliste. La grand-mère est aussi un personnage rêvé, une idéalisation de la femme âgée, de l'amoureuse des mots et la tendresse incarnée.

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